L’ère du taureau a vu Moïse faire son manège, celle du bélier s’est conclue avec la crucifixion de Jésus. Nous en sommes maintenant à la fin de l’ère du poisson et l’avènement de l’ère du verseau passera par la fondation de l’Ensemble Potentiel dans la paix perpétuelle, à l’image de la République de Platon ou du règne des fins de Kant. Les philosophes trouveront enfin le moyen de dépasser le mur idéologique érigé par la kapitale religion inconsciente des êtres humains, celle qui saigne ces poisson$-poisson$, pharaons obnubilés par leur propre subjectivité tels des sujets divisés entre leurs désirs et leurs responsabilités, de cet Aquarium social que nous nommons « le monde ». Quelle est cette religion inconsciente et comment la transcender ? En philosophant cyniquement, de façon à faire rougir de honte Diogène de Sinope. Et si nous demandons à Dieu de nous aider, il nous répondra : « Même moi je ne peux pas vous aider sur ce coup-là. Usez de votre raison post-métaphysique une fois pour toutes et laissez-moi me reposer. »
Indéfinition du kyurensiiisme
Avant d’enchaîner, laissez-moi vous expliquer pourquoi les trois i : il s’agit d’un clin d’œil à l’attitude pharaonique des poisson$-poisson$ qui leur est dictée par leur Irrépressible Identité Illusoire. Alors, qu’est-ce que le kyurensiiisme? Même s’il est vénéré inconsciemment tandis qu’il nous désenchante, il s’agit du dernier mythe social qui aura autorité sur la race humaine. Paradoxalement, il est aussi l’un de ses plus anciens. Et il sera également le dernier car après sa chute, il ne restera que la raison et un consensus mondial géninomique (nous reviendrons sur la géninomie) pour guider la société dans la bonne direction. À moins que nous soyons véritablement globalement d’Irréductibles Imbéciles Irrationnels.
Évidemment, cette religion est inconsciente car ses contours n’ont jamais été tracés dans la psyché des poisson$-poisson$. Leur Dieu, le sans-symbole, est baptisé Kyurensi (currency) ; il s’agit d’un requin-pharaon chimérique qui n’existe pas comme tel. S’il existait, il aurait le même effet sur les gens que s’il n’existait pas. Il est la chimère à la main invisible du marché ; le Léviathan de Hobbes est son édenté chihuahua castré. Kyurensi est l’impact dynastique et psychosocial des concepts d’argent, de finance et de marché sur la psyché des poisson$-poisson$.
Voici donc le Dieu que réclamait Heidegger quand il a dit : « Seul un Dieu peut nous sauver », en faisant référence au mur des lamentations philosophiques. Maintenant que nous l’avons imaginé et poétisé, il est temps de l’exorciser pour nous sortir de notre déclin.
Le kyurensigramme transactionnel ou les 5 mouvements de l’exorcisme
Passage de l’anthropologie populaire à la création du fétiche
Créons-nous une forme conceptuelle composée de toutes les essences des impacts de l’argent sur la psyché des poisson$-poisson$ depuis toujours : pollution motivée par le profit, exploitation indigne des travailleurs indignés, aliénation généralisée, régimes politiques néfastes, avarice maladive, immonde trafic humain, vol et meurtres inspirés par le gain, exacerbation de la subjectivité, et j’en passe. Prenons tout ça et imaginons notre chimère, le démon qui a tué Dieu en le croquant comme on croque dans le fruit interdit. Je vous présente le squale pharaon, l’inébranlable logique monolithique qui tient le monde dans sa main invisible, et assignons-lui un symbole : le k avec deux barres. Le sans-symbole est désormais sans-sans-symbole.
Passage du fétiche à la déconstruction
Maintenant que nous pouvons saisir facilement le démon de notre eudémonisme, nous pouvons établir sa fonction en isolant ses moyens et ses fins. Toutes ses fins, pour ne pas dire sa faim, pointent vers le profit personnel, mais puisque nous traitons l’économie comme d’un jeu à somme nulle, tout profit implique une dette du côté pile de sa face. L’un doit perdre pour que l’autre gagne. En ce qui concerne ses moyens, son outil le plus utilitaire est la monnaie sous toutes ses formes, que nous pouvons conceptualiser comme du droit divin liquide car tout achat est la prétention au droit d’acquisition dudit objet. Ce système de valeur, le vrai opium du peuple, exacerbe la subjectivité pharaonique des poisson$-poisson$. Nous voyons maintenant que Kyurensi est une construction mentale, il n’y a rien de naturel dans ce système de pensée.
Passage de la déconstruction à la défétichisation
Depuis notre émancipation de la nature, nous avons transcendé nos méthodes de production, nos méthodes de gouvernance, jusqu’à nos méthodes d’existence même. Or, jamais, au grand jamais, n’avons-nous transcendé notre méthode « d’échange » ; c’est plutôt Kyurensi qui nous a transcendés. En réifiant sa fonction, la monnaie est devenue liquide et s’est échappée de sa structure, contaminant les moyens et les fins des autres systèmes avec sa fonction. La fin ne justifie plus les moyens, ce sont maintenant les moyens qui justifient la fin. Comment alors continuer à vénérer l’invénérable ?
Passage de la défétichisation à la transcendance apeirotypique
Il est maintenant évident que collectivement, nous sommes sous l’effet de cet archétype surpuissant, je dirais même que nous sommes en plein débalancement apeirotypique. Je ne m’éterniserai pas sur ce que sont les apeirotypes, mais il s’agit d’une théorie qui stipule que le subconscient est constitué d’une dualité de super archétypes qui sont en relation inlexique, influençant le negen-vouloirêtre des êtres conscients telle une usine d’idées et de comportements. Nous ne voulons pas ne pas être en état de symbiose. Nous ne voulons pas ne pas être en état de prospérer. Nous ne voulons pas ne pas être en position d’évoluer. Seul Kyurensi ne veut pas ne pas être en position de nous empêcher de changer, le changement étant le propre de notre nature. Alors changeons juste pour nous donner naturellement raison.
Passage de la transcendance apeirotypique à la géninomie
Nous voici face à ce spectre qui nous possède corps et âme. Il nous hante depuis que nous savons compter sur nos doigts et nous a fait oublier que nous devions compter les uns sur les autres. Ce que nous avons toujours considéré comme un intermédiaire, permettant d’attribuer une valeur à notre labeur et d’établir la confiance entre des inconnus, s’est transmuté en hypermédiaire, complètement vidé de sa valeur et de sa confiance ; une coquille vide de sens qui nous fait perdre le cap, nous éloignant du Bien Suprême : l’Ensemble Potentiel. Maintenant que nous avons exorcisé un Dieu, il nous sera possible de dépasser ce que Max Weber appelait « la guerre des dieux » grâce à la géninomie. Nous pourrons établir notre propre contrat social et créer de l’argent à partir de rien, comme les banques, et le distribuer de façon éthique pour contrer les inégalités sociales.
La géninomie ou le requiem de l’économie
Si l’économie est influencée par une main invisible, nous ferons alors apparaitre l’autre main ainsi que toute cette chimère grotesque grâce à la géninomie. Cette future sphère de la vie en société fera office d’autorité spirituelle sur l’autorité financière, contrebalançant les pouvoirs séculiers des banques et des gouvernements avec le pouvoir du peuple, comme la Cité de Dieu impose sa loi divine à la Cité terrestre. Grâce à la technologie blockchain, rebaptisée « transrosaire » car les adeptes des cryptomonnaies ont galvanisé le terme au point de faire rouiller sa crédibilité sous le poids de l’impertinence, tous les humains de la Terre pourront s’unir sous la bannière de l’Ensemble Potentiel. Ainsi, se connectant entre eux grâce à leur totem géninomique, leur identité numérique, ils pourront facilement participer aux décisions politiques et endosser ou critiquer un contrat social concret, nommé le Pacte d’Orion. Ils auront aussi le pouvoir d’émettre leur propre monnaie à partir de rien (des lignes de code), ce qui sera une façon d’indexer les salaires des travailleurs réellement utiles comme les enseignants ou les infirmières et j’en passe, créant enfin pour les générations futures un incitatif tangible pour les inspirer à suivre des professions salvatrices.
Le prolétariat pourra également se servir du transrosaire pour géninominer les entreprises et industries qui ne se montrent pas assez géninomiques. En instaurant une gouvernance alternative sur le transrosaire, inspirée par les DAO (decentralised autonomous associations), les travailleurs pourront établir leur propre hiérarchie et éthique de travail puis indexer leur salaire s’il se trouve sous un seuil voté totémiquement.
Le peuple pourra également mettre en place des institutions géninomiques, qui seront nommées « les Racines ». Ces organisations pourront proposer des projets de société pour réduire le labeur tout en augmentant l’abondance et en diminuant le gaspillage, le tout pouvant évidemment être voté par le totem géninomique. Ceci permettra à l’être humain du futur de s’affranchir de toute forme de monnaie ou de finance pour s’inspirer à contribuer à l’Ensemble Potentiel et à gérer ses interactions entre individus avec dignité, transcendant les indignes transactions sans âme avec une preuve de travail et une preuve d’enjeu vérifiable sur le transrosaire.
Le kyurensi
La nouvelle monnaie de l’Ensemble Potentiel prendra évidemment comme symbole celui de ce qu’elle entreprend d’exorciser, pour nous souvenir de la fin de cette entreprise dynastique. Son nom sera écrit sans sa lettre kapitale et sera toujours invariable. Un kyurensi, des kyurensi.
Lors de sa première émission, une valeur de genèse lui sera attribuée sur le transrosaire. Ensuite, des algorithmes et des IA pourront le faire fluctuer pour suivre le coût de la vie, neutralisant ainsi les effets délétères de l’inflation. Évidemment, ce nouveau pouvoir d’achat stimulera l’inflation dans l’économie, réduisant la valeur des monnaies fiduciaires. Cependant, selon le Pacte d’Orion, les gens s’accorderont sur la valeur algorithmique du kyurensi qui ne fait pas partie de l’économie, mais bien de la géninomie gouvernée par ses propres lois. Ainsi, le requin se mangera la queue. Le kyurensi sera davantage un moyen de paiement qu’une monnaie. Le jour où le kyurensi sera l’étalon de la valeur, ce jour-là ce seront les gens qui voteront le prix de vente de tout objet par consensus géninomique via leur totem.
Avec ce déluge de kyurensi octroyé aux méritants, en espérant qu’ils consomment de façon plus écoresponsable, les gens pourront enfin réellement voter avec leurs deux argents (le pluriel de ce nom non comptable est voulu ; de l’argent non comptable, faut le faire).
Conclusion ou commencement ?
Maintenant que le futur est possible, est-ce qu’une idée aussi folle, tenant autant de la science-fiction que de la philosophie, convaincra les gens de pêcher leur ennemi commun, l’imaginaire Kyurensi aux conséquences bien réelles, tels des épaulards géninomiques ?